Le droit produit par les administrations d’Ancien Régime n’est pas qualifié de droit administratif par la doctrine de l’époque laquelle, si elle prenait sans doute bien conscience de la spécificité des règles propres à l’Administration, ne les a guère étudiées dans le cadre d’une science administrative. Il est vrai, aussi, que la définition même du droit administratif soulève encore aujourd’hui bien des difficultés et qu’il est compliqué, dès lors, d’établir avec précision quand il est apparu. Pour autant, la conscience de l’existence d’une sphère du droit public, distincte de celle du droit privé, se développe très tôt chez les juristes comme chez les administrateurs ou les administrés. Le fait administratif est donc connu des hommes de l’Ancien Régime.Partant de l’hypothèse, réaliste, que l’Administration de l’ancienne monarchie a aménagé un cadre juridique pour agir et qu’elle produisait donc des normes, cet ouvrage a pour ambition de questionner les textes et les pratiques issus des administrations afin de déterminer leur caractère impératif, leur force contraignante, leur esprit et les principes qui les animent. Il ne s’agit plus de s’interroger sur la réalité du droit de l’Administration d’Ancien Régime, mais plutôt d’en découvrir l’économie et de chercher à savoir comment, et jusqu’où, la monarchie s’est limitée ou a été limitée par le droit. Cette démarche doit permettre d’aller au-delà du régime politique et de la concentration du pouvoir qui lui est propre, d’accepter la réalité du droit produit et observé par les institutions publiques afin de caractériser leur régime administratif. Il s’agit donc d’éclairer l’ordre juridique dans lequel agissaient administrateurs et administrés et de réfléchir à la position qu’occupait l’État royal en son sein. Cette problématique est d’autant plus essentielle qu’elle s’inscrit, pour le XVIIIe siècle, dans un climat d’opposition entre le gouvernement royal et ses commissaires d’un côté, les parlements et leurs officiers de l’autre.
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